Ouverture du nouveau cabinet !

Présentation de nos nouveaux locaux au 61 rue Marx Dormoy à Grenoble. Un endroit partagé avec Emmanuel Dufour et Solange Delagenière.

Vendredi 12 mai, Emmanuel Dufour, Solange Delagenière et moi avons célébré avec plaisir et fierté la création de notre cabinet. Une cinquantaine de personnes sont venues découvrir nos locaux situés 61 rue Marx Dormoy, dans l’enceinte de la société Guillot.

La petite maison qui abritait auparavant les bureaux de la société a été complètement réaménagée. Un escalier extérieur conduit à une salle d’attente et deux entrées au rez-de-chaussée permettent l’accès aux personnes à mobilité réduite.

Chaque praticien dispose de son propre cabinet où il peut accueillir des personnes seules et des couples.

Une salle suffisamment grande pour réunir jusqu’à 12 personnes est destinée aux formations et aux groupes de thérapie.

Il est également possible pour d’autres praticiens de louer les différents cabinets et la salle de groupe dans les créneaux libres. 

Que faire de nos angoisses ?

Incontestablement, nous traversons actuellement une période très agitée. La guerre, l’incertitude climatique, l’agitation sociale rugissent et s’affichent partout autour de nous. Très certainement, cela fait émerger des questionnements, des peurs et des angoisses.

Je suis frappé par le nombre de mes clients qui me parlent d’angoisses, de nuits sans sommeil, de tensions internes, comme un mal-être diffus qui brouille la pensée, torture le corps et agite l’esprit. « C’est comme si tout était froissé sous la peau », décrit une jeune cadre, « comme si j’étais mal habillée de l’intérieur ». « Je me réveille trop tôt le matin, les muscles tendus et les pensées qui tournent déjà en boucle », me dit un autre. « Cette tristesse que je ressens continuellement, elle me colle à la peau et je n’en veux plus », me confie un troisième.

Au début de notre ère, le philosophe stoïcien Epictète[1] disait que ce qui trouble les Hommes, ce ne sont pas les choses mais les jugements qu’ils portent eux-mêmes sur les choses.

Vous me direz qu’à cette époque, les philosophes grecs ne vivaient pas dans notre monde hypermédiatisé où des quantités colossales d’informations viennent continuellement et inconsciemment solliciter nos sens et activer nos jugements.

Malgré tout, nous est-il encore possible d’adopter la première discipline des contemporains de Marc Aurèle[2], à savoir discipliner nos jugements ? Avons-nous le temps et les occasions de faire le tri entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous ? Savons-nous discerner dans nos pensées ce qui relève de la supposition, ce qui provient de nos croyances toutes faites, ce que nous projetons de notre propre vécu ?

J’invite souvent mes clients à faire cet exercice. Décrire avec précision les informations dont ils disposent. Exprimer à haute voix les pensées qui leur viennent. Prendre conscience des manifestations dans leurs corps.

Et faire pause.

Une pause, comme le suggérait Epictète, pour arrêter ces idées et ces sensations qui se présentent à nous « à l’insu de notre plein gré ». Faire une pause pour demander leurs papiers d’identité à nos pensées immédiates. D’où provenez-vous, paroles et images qui m’assaillez ? Comment vous êtes-vous construite dans ma pensée ? A qui appartenez-vous ? A mes parents ? A ma culture ? A mon histoire personnelle ? Et vous, douleurs et somatisations qui se manifestez dans mon corps, que cherchez-vous à me dire ? Contre quoi espérez-vous encore me protéger ?

C’est à cela que sert mon cabinet. Un endroit où il est possible de prendre le temps. De s’interroger soi-même plutôt que de se laisser embarquer par toutes ces idées noires qui s’imposent, pour laisser glisser toutes ces angoisses qui enserrent le corps et emprisonnent le cœur. Oublier l’urgence. Prendre le temps d’être en lien avec soi-même. Se donner le droit de ne pas être seulement fusible d’un passé révolu, d’une histoire qui se répète.

Alors, que pouvons-nous faire de nos angoisses ?

Il y a l’angoisse qui vient de l’information continue. Or, trop d’information ne fait pas que tuer l’information ; elle noie celui qui trop souvent s’y baigne. Avons-nous le droit de poser cette question ? Avons-nous réellement besoin d’autant de connexions ?

Il y a l’angoisse dont nous sommes les initiateurs. Celle produite par nos propres jugements sur les choses, celle qui provient de nos croyances sur nous-même, sur les autres et sur le monde. C’est à celle-là que s’adresse la plupart des théories et pratiques de l’accompagnement par le coaching et la psychothérapie. Faire face à ces angoisses requière une discipline : faire confiance à un autre.

Il y a l’angoisse « gobée ». Plus profonde, plus difficile à mettre en mots, elle s’est installée en nous quand, enfant, nous vivions au contact des adultes. Paradoxe terrible de constater que ceux-là même qui nous enseignaient la vie déposaient en nous leurs propres peurs ! Inconsciemment, en faisant de leur mieux avec amour pour notre bien[3].

L’angoisse gobée est inscrite dans notre identité. Nous croyons qu’elle est à nous alors que, le plus souvent, elle ne nous appartient pas. Parce que cette forme d’angoisse appartient au monde imaginaire de l’enfant que nous étions, elle se travaille avec du symbolique, avec le geste, avec le corps. J’évoque ici le domaine du travail psycho-corporel.

Face à l’angoisse gobée, la pensée est un leurre, pire, elle est même un piège. Pour traiter ces angoisses, il faut reconstruire. Reconstruire le lien à l’autre. Reconstruire le lien au monde. Reconstruire le lien à soi. Et c’est dans la relation avec un autre, un psychopraticien, parfois au sein d’un groupe de thérapie, au travers d’un projet personnel mené sur le moyen-long terme, que l’on peut profondément et durablement retrouver de la sérénité. Ne rien rejeter, ne rien effacer mais accueillir l’angoisse plutôt que de lutter contre elle, l’apprivoiser plutôt que de lui faire la guerre.


[1] Epictète (50-125 ap. J.-C), philosophe grec stoïcien. Il défend la thèse que l’homme peut parvenir à la liberté et au bonheur, en ne s’attachant qu’aux biens qui dépendent de lui. Pour en savoir plus, se reporter au Manuel, lequel est un résumé de la doctrine stoïcienne, condensé de son enseignement rédigé son disciple, Arrien.

[2] Marc Aurèle (121-180 ap. J.-C), empereur, philosophe stoïcien et écrivain romain. Auteur des Pensées pour moi-même. Pour en savoir plus, se reporter à Introduction aux Pensées de Marc Aurèle, initialement publié sous le titre La Citadelle intérieure, de Pierre Hadot

[3] Petit clin d’œil à C’est pour ton bien, de Alice Miller.

Le soufflé au fromage

Chaque fois que nous sommes confrontés à un problème, à fortiori lorsqu’il est complexe, chacun de nous doit choisir entre deux options : affronter la réalité et ses dangers ou percevoir le monde de manière à ce qu’il cadre avec ses croyances et ses certitudes. La méconnaissance est un mécanisme inconscient auquel nous sommes tous exposés.

Lors d’un entretien au cours duquel nous faisions l’analyse de son besoin en formation, le dirigeant émis cette phrase : « je ne veux pas que cette action soit comme un soufflé au fromage ».

« Une demande implicite, pensais-je, il ne veut pas que sitôt terminée, l’effet de la formation s’effondre en sortant du four ».

A cet instant, peut-être que mon interlocuteur considérait qu’une formation bien faite pouvait conduire à des changements de comportements et que, d’un coup d’un seul, les anciennes pratiques seraient remplacées par de nouvelles, plus ajustées, plus performantes, plus collectives.

Cette idée pouvait sans doute être portée par une noble intention et justifiée d’un point de vue économique. Mais je fis l’hypothèse que le dirigeant manifestait une méconnaissance.

En Analyse Transactionnelle, la méconnaissance est définie comme l’omission inconsciente d’une information utile à la résolution d’un problème. Elle s’accompagne d’une distorsion de la réalité, c’est-à-dire d’une exagération d’un des aspects de cette réalité.

En l’occurrence, je pensais que l’omission était que tout changement demande du temps. Faire changer les habitudes et les comportements nécessite un travail régulier centré sur la lutte qui nait entre l’évidence rationnelle du changement et l’homéostasie du système. La force de cette forme de résistance réside dans le tissu de nos peurs inconscientes et souvent refoulées, difficilement avouables dans le cadre professionnel.

La distorsion que j’avais à l’esprit était l’idée qu’une formation, lorsqu’elle est bien menée et bien argumentée, peut être suffisante pour conduire aux changements voulus.

Cependant, quand on fait un travail en individuel, on peut observer que deux facteurs sont indissociables du processus de changement : la fréquence du travail et la solidité de la posture de l’accompagnant.

La régularité participe à la mise en conscience des mécanismes d’évitement refoulés. La capacité de l’accompagnant à se montrer solide, ferme et en même temps bienveillant permet à la personne d’être soutenue et encouragée dans la découverte et l’expérimentation d’un faire différemment.

Pour une équipe, ces deux facteurs sont tout aussi fondamentaux : aucun changement ne peut être envisagé sans qu’une forme de régularité soit mise en œuvre et sans que le leader incarnant le changement ne soit présent tout au long du travail.

En d’autres termes, je suis convaincu qu’une formation n’est jamais suffisante pour conduire à un changement. Cette forme d’action doit nécessairement être inscrite dans un projet plus large avec des objectifs à moyen terme au cours duquel les personnes concernées seront régulièrement réunies, en présence de leur leader, pivot central et incarné de la réassurance et de la sécurité dont a besoin chacun des acteurs.

Pour revenir à notre histoire, la suite de l’entretien infirma mon hypothèse. Mon interlocuteur était parfaitement conscient de la situation et n’avait émis dans sa phrase du début que la force de son intention.

Dois-je faire l’hypothèse que j’ai, moi aussi, quelques méconnaissances ?

Procrastiner, mais pour quels bénéfices?

Procrastiner n’est pas ne rien faire. C’est en réalité une lutte interne qui consomme beaucoup d’énergie…en voici une illustration.

L’homme a une grande expérience professionnelle. Il est aujourd’hui membre du comité de direction de sa société. A priori, il ne devrait pas être de ceux qui doutent, de ceux qui manquent de confiance en eux, de ceux qui procrastinent…à priori.

C’est malgré tout bien pour résoudre une difficulté touchant à l’estime de soi, révélée dans le contexte de sa relation singulière avec le dirigeant, qu’il m’a demandé de l’accompagner. Il est conscient qu’à cet endroit, il ne se respecte pas totalement et qu’il pourrait se positionner autrement : « j’ai trop souvent le sentiment de ne pas être à la hauteur, de ne pas me sentir légitime dans mes fonctions. Je sais ce qu’il faudrait que je fasse ou dise, mais je procrastine ».

Lors de notre séance, nous sommes au milieu du processus d’accompagnement. J’observe depuis peu que nous tournons en rond. Je me sens embarrassé, troublé par un sentiment diffus de ne pas tout à fait être à la hauteur de mes engagements vis-à-vis de lui. En vérité, je sens émerger comme un doute sur ma légitimité. J’hésite à le confronter. J’ai envie de lui faire part de mon irritation. Je résiste à l’envie, assez puissante, de me montrer direct, peut être agressif.

Il m’apparaît évident qu’à cet instant, je suis dans la danse de la procrastination : je veux que quelque chose change, mais je ne sais pas par quel bout prendre le problème. J’ai envie, mais j’ai peur.

En surmontant la croyance que je pourrai me montrer rigide, peut être directif, possiblement fragile, j’ai confronté mon client tout en lui faisant part de mon inconfort. Il m’en a remercié. Analysant de lui-même la situation, il su reconnaitre qu’il avait le fantasme que je lui donne la solution à son problème (Au prix que je vous paye !). A mon tour, je l’ai remercié de m’avoir lui aussi offert l’occasion de dépasser mes propres failles. Nous avons cessé, ensemble, de procrastiner. Nous avons renforcé notre alliance.

Procrastiner, contrairement à l’idée reçu, ce n’est pas rien faire. Procrastiner demande de l’énergie, beaucoup d’énergie. Et cela fatigue. L’action n’est pas visible, elle est sous-jacente. En procrastinant, on lutte, on évite le contact avec ce qui dérange, avec ce qui fait peur, avec ce qui pourrait nous rendre fragile. Bien souvent, on voudrait que l’autre, que le destin, décide à notre place.

Procrastiner est un processus inconscient qui éclaire nos zones d’ombre, qui les rend active dans le réel. Du point de vue de la Gestalt, l’objectif de la procrastination n’est pas de résister au changement, il serait en fait plutôt la preuve d’une envie de changer rendue hésitante par nos peurs et nos

Procrastiner ne serait pas un processus de résistance au changement mais au contraire, une tentative d’entrer dans le changement.

Pour sortir de la procrastination, rien de tel que de demander de l’aide et de s’ouvrir à celui qui vous la propose.

Heureux ceux qui procrastinent ! S’ils le savent, c’est qu’ils veulent changer !

Travail de coaching ou de psychothérapie ?

Théoriquement, la frontière entre le coaching professionnel et la psychothérapie individuelle est bien définie. Les éléments de cadre étant distincts, il est facile d’énoncer de nombreuses différences, au niveau de la structure, des processus, des codes de déontologie, etc..

Pour exemples, le coaching s’adresse aux questionnements et aux difficultés rencontrés dans l’espace professionnel quand la psychothérapie s’adresse aux questionnements et aux conflits intrapsychiques. Dans le cadre professionnel, les objectifs sont clairement identifiés et s’inscrivent dans une limite de temps définie à l’avance et faisant partie de l’objectif. Dans l’espace thérapeutique, le temps n’est plus une composante de l’objectif. Il devient facteur de sédimentation. Les objectifs de changement sont moins faciles à cerner car plus enfouis dans l’inconscient.

Hors situation d’accompagnement, les différences sont nettement identifiables entre les deux champs. Il arrive cependant, en cours de séance de coaching que les frontières deviennent plus difficiles à identifier.

Comment le coach doit-il se comporter ? Que faire quand les croyances et les angoisses profondes du client s’invitent dans le travail d’accompagnement professionnel ? Faut-il suivre la règle du cadre professionnel et ainsi exclure ce travail intrapsychique du coaching ? Doit-on prendre le risque de ne pas aider le client à avancer dans l’ici et maintenant ? Inversement, peut-on les prendre en compte et transgresser une limite ? Peut-on prendre le risque d’explorer ce qui relève du passé et en faire usage dans le cadre d’une prestation de coaching professionnel ?

Du côté de l’accompagnant, ce questionnement est essentiel. En tant que responsable du cadre et des processus d’accompagnement, c’est à lui que revient le devoir de travailler sa pratique avec l’aide d’un superviseur, de se former et de s’ouvrir à différentes pratiques, à différents courants.

Du côté de ceux qui veulent se faire accompagner, l’objet de ma réflexion est ici de les inviter à réfléchir à ce dont ils ont besoin. Être soutenu dans une difficulté personnelle ? Mieux gérer ses interactions avec les autres ? Mieux se comprendre dans des situations particulières ? Mieux prendre sa place ? Développer son pouvoir d’influence ? Aller vers une plus grande autonomie ? Creuser des questions existentielles ?

Pour chacune de ces questions, il s’agit de mesurer ce qu’éveille en soi le besoin. Avec les exemples qui viennent à l’esprit, se demander si cela concerne exclusivement la sphère professionnelle ou si les dimensions personnelles sont belles et bien présentes dans ces questionnements.

En fonction de ce que la personne va sentir, de ce qui va émerger en elle, elle pourra suivre son intuition et orienter sa recherche et son questionnement vers le praticien qui semblera lui apporter plus d’assurance. Accompagnant spécialisé dans le coaching professionnel dont la pratique est orientée vers le monde du travail et les organisations ? Ou un accompagnant plus proche de l’individu et plus à l’aise pour jouer avec ces frontières entre ce qui relève du professionnel et de l’intrapsychique ?

Trouble psychosomatique : c’est quoi le message ?

« Un symptôme se forme à titre de substitution à la place de quelquechose qui n’a pas réussi à se manifester au dehors« . Sigmund Freud

Parfois, nous pouvons être affectés de symptômes, et même de maladies, auxquels la médecine académique ne trouve ni origine ni explication scientifique. « C’est psychosomatique « , va-t-on un jour nous dire. Avec plus ou moins de commisération, avec cette pointe de jugement, comme pour nous dire que nous ne faisons pas assez d’effort pour nous soigner, ou avec empathie, mais sans solution, ce qui nous laisse un vague sentiment de culpabilité, et parfois même, de l’angoisse.

Est-ce le corps qui nous parle ? Est-ce notre esprit qui communique ? Peu importe, car le trouble psychosomatique est une réalité dans l’ici et maintenant. Il s’inscrit dans le corps, traumatise les organes, fait souffrir physiquement et psychiquement.

Les différentes écoles ou approches en psychologie et en psychopathologie s’accordent pour dire que la personne qui « somatise » traverse un conflit intrapsychique non conscientisé et non résolu : ce serait comme si l’esprit cherchait à traduire quelque chose ne pouvant se dire ni par les mots, ni par les émotions.

Depuis ce point de vue, le trouble psychosomatique est une symbolisation, un message à déchiffrer. Il est une histoire d’ordre psychocorporel à accueillir et à apprivoiser si l’on veut l’adoucir et si possible, s’en défaire.

Ma pratique, qui consiste à aider la personne à unifier et à intégrer ce qui relève de l’esprit, du corps et de l’affect, s’étend et se diversifie dans le cas des troubles psychosomatiques. Parce qu’ils sont inscrits dans les couches enfouies du corps et de l’esprit, il est nécessaire que l’exploration et la rencontre se fassent à ces niveaux de profondeur. Parler au corps et à l’esprit non plus avec des mots, mais avec des mises en situation, des exercices psychocorporels et d’autres formes d’expérimentations que le mental ne sait pas concevoir, ne sait pas (encore) déchiffrer.

Soulager et guérir le trouble psychosomatique s’obtient rarement par une seule voie car cela dépend intimement de la sensibilité et de la personnalité de celui ou de celle qui en souffre. Je trouve particulièrement utile et intéressant d’associer à la démarche d’autres thérapeutes qui chaque fois enrichissent le travail avec des points de vue, des cadres de référence et des pratiques très différents des miens.